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Comprendre l’enjeu de Dry January, mois de janvier sans alcool

le 07/01/2022

Ce mouvement, qui se démocratise peu à peu en France, permet notamment de détecter d’éventuelles dépendances. Explications avec le Dr Philippe De Azevedo, médecin-addictologue à la Clinique des Platanes, située à Épinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis).

Passer le mois de janvier sans boire de boissons alcoolisées.
Passer le mois de janvier sans boire de boissons alcoolisées.

Passer le mois de janvier sans boire de boissons alcoolisées : c'est la proposition du mouvement Dry January (en français : « janvier sec »). Ce mouvement, qui se démocratise peu à peu en France, permet notamment de détecter d’éventuelles dépendances. Explications avec le Dr Philippe De Azevedo, médecin-addictologue à la Clinique des Platanes (Ramsay Santé), située à Épinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis).

Durant les fêtes de fin d’année, la consommation plus ou moins excessive d’alcool est courante, en raison de l'atmosphère festive de cette période. L'idée de Dry January, lancée en 2013 par l'ONG britannique Alcohol Change UK (dont la mission consiste à sensibiliser la population aux méfaits de l'alcool) est d’encourager ceux qui le souhaitent à débuter la nouvelle année en étant plus attentif à leur santé, en passant 31 jours sans boire d'alcool. « Ce mouvement permet aux consommateurs de visualiser les bienfaits que cette pause peut générer sur leur organisme », explique le Dr De Azevedo. Se passer d’alcool permet en effet d’améliorer la qualité du sommeil, de l’humeur, de perdre du poids, d’être plus énergique et d’avoir un meilleur teint.

« Toutefois, un individu diagnostiqué dépendant à l’alcool doit absolument être accompagné dans sa démarche de sevrage. Il ne lui est absolument pas recommandé de réaliser le Dry January de manière autonome, car un sevrage réalisé seul chez une personne dépendante comporte des risques », insiste le médecin-addictologue. Pour rappel, une personne est considérée comme dépendante dès lors qu’elle perd le contrôle sur sa consommation et que celle-ci lui engendre des conséquences négatives pouvant être organique, relationnelle, professionnelle ou judiciaire (à l’inverse d’un consommateur excessif qui boit de l’alcool lors d’un événement spécifique, mais qui est tout à fait capable de s’en passer et de se contrôler). « La dépendance à l’alcool est plurifactorielle, mais est avant tout d’ordre neuropsychologique et comportemental », souligne le spécialiste.

Faire la différence entre dépendance et consommation excessive

Pour les médecins-addictologues, le Dry January est un moment idéal pour évaluer son rapport à l’alcool. Il est parfois assez difficile pour une personne de repérer si elle se situe dans un cadre de consommation contrôlée, excessive ou de dépendance. Lors du Dry January, certains individus sont d’ailleurs surpris de la difficulté qu’elles rencontrent pour ne pas consommer d’alcool dans certaines circonstances, ce qui peut déboucher sur un questionnement sur leur rapport à la boisson. 

Une dépendance ne signifie pas forcément une consommation quotidienne. Certains éléments doivent alerter : rapidité de consommation, recherche d’une fonction (anxiolytique, hypnotique, anesthésiante), incapacité à s’arrêter lorsque la consommation commence. « Pour un patient dépendant, il est plus facile de ne pas commencer à boire que de boire un verre et s’arrêter » explique le professionnel de santé. Parmi les symptômes évocateurs d’une dépendance, on retrouve aussi : l’incapacité de s’arrêter au nombre de verres que l’on avait prévu de boire, un désintéressement pour toute sorte d’activités à cause de l’alcool ou encore un mal-être causé par le manque de consommation « qui génère alors une irritabilité » dévoile l’expert.

Faute d’une nouvelle prise d’alcool, les personnes dépendantes ressentent des symptômes de sevrage plus ou moins graves : anxiété, tremblements, sueurs, tachycardie, troubles du sommeil, crises d’épilepsie voire délirium tremens (délire tremblant). C’est la raison pour laquelle les personnes dépendantes ne doivent pas entamer un sevrage de manière isolée. Elles ont besoin d’un accompagnement et d’un suivi médical, à l’inverse d’un consommateur excessif qui peut réaliser le défi Dry January en autonomie, sans se décourager en cours de route en cas de non-respect absolu des règles. « Le fait de ne pas boire durant une ou deux semaines doit déjà être perçu comme une réussite pour des individus habitués à la consommation. Cette période peut d’ailleurs les aider à repérer un début de dépendance » conclut le spécialiste en insistant sur les dangers de la consommation compensatrice (type cannabis) durant cette période.